Un roman français, de Frédéric Beigbeder (2009)
Grasset


Il existe deux grands protagonistes pour ne pas dire antagonistes dans la bibliographie de Frédéric Beigbeder. Vous les avez ? Octave Parango, publicitaire déjanté (99 Francs) devenu “model scouting” en Russie (L’Idéal) avant de rejoindre les grandes ondes françaises pour y animer une chronique matinale sur la “première radio du pays” (L’homme qui pleure de rire). Ce type, aussi brillant que blasé, aussi cynique que romantique est quand même bien du genre à prendre la lumière, toute la lumière. Pourtant, un second personnage est sorti de l’ombre en la personne de Marc Marronnier Mémoires d’un jeune homme dérangé, Vacances dans le coma et L’amour dure trois ans en formant la trilogie). Un personnage bien plus nuancé, paumé et romantique. La définition du looser à l’ère actuelle. Peu importe, finalement. J’ai déjà entendu dire que ce bouquin était le meilleur de Beigbeder. Voyons voir.

Tout débute par une arrestation pour usage de stupéfiants sur la voie publique, enfin, soyons précis sur le capot d’une bagnole sur la voie publique (en 2008, Frédéric Beigbeder a fait la une pour ce fait glorieux). Tu es en compagnie de ton ami, que tu nommes le poète, Simon Liberati. Tu te retrouves donc en cellule, dans la crasse visuelle et odorante d’une cellule. À te croire, c’est à ce moment précis que tu décides d’écrire ce roman. Un roman français. Doit-on comprendre au titre que cette histoire est semblable à des milliers d’autres ? Oui, c’est le cas. Un divorce, des relations fraternelles complexes, l’envie d’exister pour le petit dernier. Mais tout le monde, cependant, n’a pas la capacité d’en faire un bouquin à la fois attachant et chiant. Un bouquin attachiant ? Car si beaucoup disent que “c’est le meilleur Beigbeder”, moi, je me suis plutôt emmerdé. Dès le début avec des répliques plates, creuses et moralisatrices de la part d’un commissaire de police. Même si le protagoniste n’a le droit qu’à un coup de fil, tout cela paraît bien téléphoné. Heureusement, cela s’améliore nettement ensuite.

C’est finalement l’histoire d’un homme qui n’a jamais vraiment voulu grandir et s’excuse derrière une enfance dont il dit ne pas avoir le moindre souvenir et qui parvient tout de même à nous broder 280 pages sur cet état de fait. La mémoire lui revient finalement à chaque mur qu’il abat, c’est l’honnêteté qui semble être la clé de cette histoire retrouvée. Pourtant, l’auteur s’échine à se cacher derrière l’autre, tout paraît subit : sa vie, ses choix, il n’était pas au volant semble-t-il. Non, lui, il prenait sa coke sur la voiture à l’arrêt cette nuit-là. Le divorce de ses parents, le départ du père, l’opposition constante entre les deux modes de vie entre lesquels il se construit. Puis le départ de son frère, dernier repère et rempart contre la question qu’il s’est toujours posé : qui suis-je ? D’ailleurs, on se rend rapidement compte, même s’il ne le dit pas clairement que le grand frère prend le costume paternel dans la tête de son cadet.

La vie du protagoniste serait donc un amoncellement de non-choix, guidé par un refus enfantin de l’autorité. Il a fallu qu’il se produise en antithèse de son frère aîné afin de donner corps à sa propre existence. Son bonheur au présent ne semble tenir qu’à un fil et toujours être dépendant de l’autre à savoir désormais sa fille. J’aimerais d’ailleurs terminer cette petite chronique en citant ce passage.

 » […] alors là, il est impossible de ne pas fondre, son rire en cascade est mon médicament, je devrais l’enregistrer pour me le diffuser en boucle les soirs de déprime. S’il fallait définir la joie de vivre, le bonheur d’exister, ce serait cet éclat de rire, une apothéose, ma récompense bénie, un baume descendu du ciel. «