La théorie de l’information, Aurélien Bellanger (2012)
À retrouver chez Gallimard
C’est ma deuxième rencontre avec Aurélien B. Je ne l’aborde pas dans l’ordre chronologique, car je réserve ça aux auteurs passés par la rubrique nécrologie. Après qu’il m’ait emmené dans les méandres de l’urbanisme avec Le Grand Paris, le voici qui me propose de traverser l’âge d’or de la communication. En bonne compagnie, puisque son protagoniste Pascal Ertanger semble une représentation plutôt fidèle d’un certain Xavier Niel… Bedonnant, cheveux gras et chemises de friperie et pourtant un vrai génie. J’ai pris plaisir à découvrir ce personnage au travers des âges. Ses débuts prometteurs dans le Minitel rose jusqu’à son hégémonie sur le web français. Je me suis régalé en apprenant ce qu’avait vraiment été le Minitel. Un véritable orgueil technologique français. Le seul souvenir dont je disposais était le vote pour Miss France en famille chaque année. Non, je n’ai pas honte.
« Pour qu’il y ait communication, il faut que le destinataire ignore ce qui va lui être transmis. Shannon nomme information la levée de cette incertitude, opérée par la réception d’un message. L’information est donc proportionnelle à la quantité de surprise que ce message contient : moins le destinataire est capable d’anticiper ce qu’il va recevoir, plus l’incertitude dissipée sera grande. La quantité d’information par message étant maximale quand la source est aléatoire. L’information, au sens de Shannon, n’est que cela. »
Entre les pages, nous croisons des citations et réflexions propres à la Théorie de l’Information de Shannon. Non, non, ce n’est pas une sauveteuse d’Alerte à Malibu. Claude Shannon était un cryptanalyste travaillant pour les services secrets américains durant la Seconde Guerre mondiale. Son rôle était de localiser automatiquement les parties significatives dans les messages ennemis codés malgré le brouillage. Son travail a conduit à la publication de l’article « A Mathematical Theory of Communication » en 1948, qui a jeté les bases de la théorie de l’information. Ce texte a ensuite été élargi en un livre en 1949 avec les commentaires de Warren Weaver, et il a grandement influencé les domaines des communications et de l’informatique.
« Dans le film 2001, le cosmonaute finit par débrancher HAL. Ce geste, au regard de notre degré de dépendance, nous est désormais interdit : on ne coupe pas l’électricité dans un hôpital – l’humanité s’est laissé conduire dans un hôpital. »
À la lecture du petit pavé (487 pages), on comprend l’implication de cette théorie dans tout ce qui a suivi en termes d’évolution des systèmes de communication. Aurélien B. parvient à nous intéresser à cette chose obscure et c’est donc plutôt réussi. Malheureusement et ça m’emmerde vraiment de l’avouer, les cent dernières pages ont été une vraie purge pour moi. J’ai dû me forcer à en finir, pour le principe. C’est comme quand tu dévores un poulet-frites et qu’au bout du compte, t’as plus la place pour les frites. Ou plutôt l’inverse puisque la dernière partie fait office de plat de résistance à la limite, à certains endroits, de la thèse. Je conseille ce livre à tous ceux qui aiment creuser un sujet, qui ont une appétence pour la communication en tant que science. J’étais quand même bien content de croiser ce roman.
À très vite Aurélien. Je sens que tu as encore des choses à m’apprendre.