Soif, Amélie Nothomb.
– Albin Michel

Récemment, j’ai éprouvé une folle envie. Une envie furieuse.
Quelque chose qui vous déchire le bas-ventre comme une envie de pisser.

L’envie d’épancher une Soif, celle des mots d’Amélie Nothomb. C’est assez improbable alors que je ne cessais de m’intéresser à l’autrice : conférences autour de l’écriture, interviews diverses et variées. Je n’avais jamais lu une seule ligne de celle qui fait pourtant office de phénomène littéraire depuis des années chez nous et bien évidemment à l’étranger. Un monstre sacré en quelque sorte. Ce que j’aime appeler les Classiques contemporains, quitte à faire grincer des dents. Mieux vaut grincer des dents que devenir la cible des quolibets de François Hollande me direz-vous. Soit. Non Soif !

J’ai demandé quelques conseils sous la forme « Par quel bouquin dois-je débuter mon aventure avec Amélie Nothomb ?« . Il m’a été conseillé Soif et comme j’ai une confiance aveugle en mes proches, je l’ai commandé sans même avoir la curiosité d’aller voir de quoi il s’agissait. Une fois le précieux en main, je regarde la quatrième couverture et là, je me retrouve face au propos suivant :  » Pour éprouver la soif il faut être vivant. » Rien de plus.

Le mépris est un démon dormant. Un démon qui n’agit pas ne tarde pas à s’étioler. Quand on est au tribunal, les paroles ont valeur d’actes. Taire mon mépris revenait à l’empêcher d’agir.
– PAGE 12-13

Je découvre les premières lignes et je comprends très vite de quoi ou plutôt de qui il s’agit. Le narrateur est un fichu barbu originaire de Nazareth… Moi qui suis loin d’être fervent croyant, j’ai soudain une légère appréhension. Et puis finalement, les pages s’enchaînent autour des divagations d’un homme qui se sait condamné par les siens et surtout par son père.

Suis-je tenté ? Oui. Plus jeune, je me réjouissais d’être élu. À présent, je n’ai plus cette faim, elle est rassasiée. Je préférerais rejoindre la douceur de l’anonymat, ce que l’on nomme à tort la banalité. Rien de plus extraordinaire pourtant que la vie commune.
– PAGE 65

C’est un texte fort, simple et minimal qui vient nous interroger sur l’amour, le pardon, les choix de vie. À plusieurs reprises, je me suis surpris à sourire bêtement. Comme quoi, il est possible de proposer des bouquins qui font du bien sans pour autant tomber dans les mièvreries du feel good.

L’orage va éclater. Les gens voudraient que je meure. Ça commence à bien faire, cette agonie qui n’en finit pas. Moi aussi, j’aimerais mourir vite. Il n’est pas dans mon pouvoir de précipiter ce trépas.
– PAGE 119

Inutile d’en dire plus, je pense que la Soif ne peut être épanchée que par soi-même et j’espère que vous aurez plaisir à le faire au travers de cette introspection déconcertante. J’en viens à me dire que si Amélie Nothomb réécrivait la Bible, j’en ferais enfin mon livre de chevet.